mercredi 17 octobre 2012

Prêtre-ouvrier

 Article mis à jour en décembre 2020 



L'Église au 19e siècle
C'est une Église qui fait non, non, non, non...
Et des cathos de gauche, laïcs et clercs, qui s'engagent auprès des laissés pour compte.
Depuis la Révolution française, le catholicisme a reconquis une part de la Bourgeoisie, mais a perdu les classes populaires. Les valeurs de l'Ancien Régime sont bousculées par le développement économique (l'industrialisation, l'urbanisation et les moyens de communication font reculer le monde rural et traditionnel) et les découvertes scientifiques (comme l'évolution des espèces) remettent en cause les affirmations de la Bible.
Un catholicisme libéral naît, mais le pape Grégoire XVI condamne ces "dérives" dés 1832, suivi par Pie IX qui en 1864 critique le naturalisme, le laïcisme et le socialisme...
1882 : Création du Parti Ouvrier, premier parti marxiste en France. 
             Loi de Jules Ferry sur l'obligation d'instruction et la laïcité de l'enseignement.
1886 : Fondation de l'Association Catholique de la Jeunesse Française dont le but est l'encadrement des jeunes catholiques désireux de se lancer dans l'action sociale.
1891 : La circulaire du Pape Léon XIII condamne la misère et la pauvreté qui pèsent sur la classe ouvrière tout en critiquant le socialisme athée et en dénonçant les excès du capitalisme. Elle donne naissance à la doctrine sociale de l'Église.
1905 : Loi sur la séparation de l'Église et de l'État.
1914-1918 : Première guerre mondiale.
1920 : Naissance de la Jeunesse communiste et du Parti communiste français.

L'action catholique
L'Association Catholique de la Jeunesse Française se scinde en organisations spécialisées consacrées aux ouvriers, aux agriculteurs, aux marins ou aux étudiants.
1925 : Le prêtre belge Joseph Cardijn (1882-1967) fonde l'association Jeunesse Ouvrière Chrétienne. Il sera suivi par le Père Georges Guérin (1891-1972) qui crée la branche française en 1927. C'est le premier mouvement catholique à comprendre que la classe ouvrière s'éloigne de l'Église. Les Jocistes s'engagent là où vivent les ouvriers afin d'aider les plus jeunes d'entre eux à s'insérer dans la vie professionnelle et citoyenne. Leur démarche est : Voir-Juger-Agir et leur slogan : Un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde.
Mais l'ordre temporel peut-il être intégré au sacré chrétien ?
1937 (19 mars) : Pie XI, le pape de l'action catholique déclare dans une encyclique : "le communisme est intrinsèquement pervers et l'on ne peut admettre sur aucun terrain la collaboration avec lui de la part de quiconque veut sauver la civilisation chrétienne".
1937 (Juillet) : Dixième anniversaire de la JOC. La manifestation rassemble plus de 60 000 personnes au Parc des Princes.
1938 : Dans 3 discours prononcés en juillet, le Pape Pie XI, sur le thème de "Catholique veut dire universel", dénonce la montée des nationalismes et encourage l'action catholique.
             La SNCF accorde des billets demi-tarif aux Frères Missionnaires qui traversent la France.
1939-1945 : Seconde guerre mondiale. Des catholiques de gauche choisissent le maquis, d'autres rejoignent les ouvriers du Service du Travail Obligatoire. Mais la hiérarchie de l'Église est aux côtés de Philippe Pétain.
1941 : La prise de conscience de la déchristianisation des milieux ouvriers et ruraux et l'idée de transformer la société traditionnelle en une société missionnaire vont donner naissance à la Mission de France.
1941 : Jacques Lœw (1908-1999) est le premier prêtre-travailleur.

Les prêtres-ouvriers
1943 : Publication du rapport des abbés Henri Godin et Yves Daniel France, pays de mission ? "Il semble que le rôle d’une mission populaire vraiment CATHOLIQUE serait de découvrir toutes les communautés humaines qui existent et de former, dans chacune d’elles, un noyau chrétien qui, avec l’aide d’un prêtre, formerait une communauté rayonnante".
            Création de la Mission de Paris par le cardinal Emmanuel Suhard. L'appartenance au monde du travail peut être une vocation de prêtre. De nombreux prêtres, désireux de partager la vie des travailleurs de leur temps, se font prêtres-ouvriers et rejoignent dés 1945, au moment de la reconstruction du pays et de la relance économique, les usines et les chantiers, non pour être parmi les travailleurs manuels, mais pour se faire ouvriers comme eux.
Après les enseignements du séminaire et un premier choix de sacerdoce, ces prêtres se convertissent une deuxième fois en acceptant de quitter un certain confort bourgeois et de s'exposer physiquement aux risques du travail manuel.
1947 (Été) : Karol Wojtyla, en voyage en France, est séduit par les cathédrales gothiques, mais aussi par l'expérience naissante des prêtres-ouvriers, qui lui a inspiré son premier article dans le journal Tygodnik Powszechny (L’Hebdomadaire universel - hebdomadaire polonais tendance catholique libérale).
1949 : L'abbé Pierre (1912-2007) et Lucie Coutaz (1899-1982) créent le Mouvement Emmaüs. Au premier compagnon, l'abbé Pierre déclare : "Je ne peux pas t'aider, je n'ai rien à te donner. Mais toi, tu peux m'aider à aider les autres".
           Le Vatican publie un décret portant excommunication de tout catholique professant la doctrine matérialiste.
1950 : L'appel de Stockholm - "Nous exigeons l'interdiction absolue de l'arme atomique... Nous appelons tous les hommes de bonne volonté dans le monde à signer cet appel" - est une pétition lancée par un mouvement d'inspiration communiste. Des militants ouvriers et des personnalités catholiques signent un manifeste intitulé Des chrétiens contre la bombe atomique, dans lequel ils approuvent cette volonté de paix. Mais l'appel de Stockholm devient un problème chrétien quand la plupart des évêques préfèrent la réserve et que d'autres clercs dénoncent des manœuvres politiques qui visent à servir les intérêts du communisme.
1952 : Parution du roman Les saints vont en enfer de Gilbert Cesbron (1913-1979, auteur également de Il est minuit, docteur Schweitzer et de Chiens perdus sans collier. Il y décrit avec force et tendresse les conditions de vie des prêtres-ouvriers qui découvrent les problèmes de travail, de logement, de misère des banlieues industrielles.
Et pour Jacques Meurice (né en 1938), prêtre-ouvrier à la retraite, "la grande découverte que firent les prêtres-ouvriers était le sens de la justice sociale... et le résultat de leur découverte était de première importance. Car enfin, où se trouvait finalement livré le vrai message chrétien ? Était-ce dans la cathédrale avec son or, ses rites, sa liturgie et son sacré ou n’était-ce pas dans l’atelier, le laminoir, le chantier, avec sa camaraderie, son partage et sa fraternité ? Un choix ne s’imposait-il pas ? Jésus n’avait-il pas renversé les échoppes des marchands dans le portique du temple ? N’avait-il pas dit que la vérité n’était pas à rechercher à Jérusalem ni sur le mont Garizim, dans les temples, mais dans le cœur et l’esprit de chaque homme ?"
1954 (1er février) : L'abbé Pierre lance un appel sur les antennes de Radio-Luxembourg : "Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant hier, on l'avait expulsée..."
1954 (Mars) : Condamnation par Rome de l'expérience des prêtres-ouvriers à cause de leur engagement syndical et politique et pour avoir ainsi brisé le mystère de la religion. C'est selon le théologien Marie-Dominique Chenu, proche du mouvement des prêtres ouvriers, "l'évènement religieux  le plus important depuis la Révolution française". On compte à cette époque une centaine de prêtres-ouvriers en activité. La plupart abandonnent leur emploi, mais quelques-uns refusent de se soumettre et conservent leur activité.
1956 : Joseph Wresinski devient l'aumônier du bidonville "Château de France" à Noisy le Grand. "Ce n’est pas tellement de nourriture, de vêtements qu’avaient besoin tous ces gens, mais de dignité, de ne plus dépendre du bon vouloir des autres". L'année suivante il crée Aide à Toute Détresse qui deviendra le Mouvement ATD Quart Monde.
1957 : Création de la Mission Ouvrière. Elle assure la coordination entre l'Action Catholique Ouvrière, la Jeunesse Ouvrière Chrétienne, l'Action Catholique des Enfants, les Prêtres-Ouvriers et les religieuses.
1962 (11 octobre) : Ouverture par le pape Jean XXIII du 2ème concile du Vatican. C'est l'entrée de l'Église dans le monde moderne, confirmée par son successeur Paul VI... mais 20 ans après, les catholiques de gauche déchanteront.
1965 (Octobre) : Les évêques de France votent la réhabilitation des prêtres-ouvriers. André Depierre (1920-2011), figure des prêtres-ouvriers a participé à plusieurs délégations aux sessions du concile Vatican II (1962-65) et a contribué ainsi à leur réhabilitation.
1965 : Publication de l'ouvrage d'Émile Poulat (né en 1920, historien et sociologue) Naissance des prêtres ouvriers. L'auteur décrit les résistances du traditionalisme, les réserves de Rome, les divergences à l'intérieur même de la Mission de Paris.
1965 (Décembre) : Parmi les documents publiés à la fin du concile Vatican II, la constitution Gaudium et spes (Joie et espoir) débute ainsi :  "Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur".
Dans le décret sur le ministère et la vie des prêtres, on peut lire : "Si l'Église veut vraiment atteindre l'esprit des auditeurs, elle ne doit pas se contenter d'exposer la parole de Dieu de façon générale et abstraite, mais elle doit appliquer la vérité permanente de l'Évangile aux circonstances concrètes de la vie".
A la gauche du Christ, on est satisfait et on souhaite continuer le combat, mais à sa droite, on considère que ça va trop vite.
1968 (Mai) : "Ce sont les patrons les plus réacs alliés aux ouvriers CGT de l'hôpital qui ont mis fin au bordel. Toujours cette vieille alliance entre la droite et les communistes, Pompidou-Séguy !Éric Hazan, ex-chirurgien et gérant de La Fabrique éditions.
1968 (Juillet) : La circulaire du pape Paul VI sur le mariage et la régulation des naissances divise le monde catholique et si dans les années 70, la guitare entre dans les églises et que des laïcs, hommes et femmes, sont aux côtés des prêtres pour transmettre le message d'humanité du Christ, de nombreux catholiques, comprenant que l'Église continue à interdire, se détournent d'elle. Les vocations aussi chutent. En 1976, il y a plus de 800 prêtres-ouvriers en France, mais ils ne sont plus que 550 en 1987, 400 environ en 2005 dont seulement 80 avec une activité professionnelle...
1984 (Avril) : Première Journée Mondiale de la Jeunesse. Plus de 250 000 jeunes se réunissent à Rome.
2004 : 50ème anniversaire de la crise des prêtres-ouvriers. La Mission de France réaffirme son engagement à envoyer des prêtres dans le monde du travail professionnel : "Nous nous voulons solidaires, nous voulons dire aux anciens notre conviction : dans les contextes différents du passé, les prêtres de la Communauté Mission de France sont envoyés au travail. Cette proposition est inscrite nécessairement dans le projet du jeune homme qui entre au séminaire de la Mission de France".
2005 : Guillaume Cuchet écrit dans la revue Vingtième Siècle. Revue d'histoire un article sur l'expérience des prêtres-ouvriers.
Résumé de l'article :
"En 2004, le cinquantenaire de la « condamnation » par Rome des prêtres-ouvriers est passé presque inaperçu, mais il a tout de même permis de constater que l’historiographie du sujet avait beaucoup progressé ces dernières années. Sans remettre en cause les acquis du grand livre qu’Émile Poulat lui avait consacré en 1964, des recherches récentes, en France et en Italie, ainsi que la publication de souvenirs et de mémoires d’anciens prêtres-ouvriers ont enrichi notablement notre connaissance des événements et renouvelé les perspectives."
 
Bilan
En 2012, sur environ 350 prêtres-ouvriers, une vingtaine d'entre eux sont en activité et travaillent dans la santé, les services à la personne, les entreprises de nettoyage. Ils peuvent être aussi chercheurs, médecins ou inspecteur du travail. Souvent syndiqués, ils exercent des responsabilités au sein de leurs entreprises. Les autres au-delà de leur retraite professionnelle continuent de vivre leur attachement au monde ouvrier et aux milieux populaires.
Mais lors d'un conflit social, la religion a-t-elle encore une place sur le terrain ?
Non, répondent les syndicalistes qui cependant reconnaissent le rôle de soutien de la religion.
Avec le déclin du modèle soviétique, l'unité des 6 millions d'ouvriers, répartis aujourd'hui dans les usines, l'artisanat, la manutention, les transports, et les services, a éclaté. Les ouvriers sont désormais plus préoccupés par le chômage et l'immigration.
Et l'expérience des prêtres-ouvriers continue de diviser :

"Les prêtres-ouvriers étaient arrivés à une forme de compréhension de l'Homme et de Dieu, réaliste." Maurice Gruau - Prêtre.
>>> Dailymotion - AUXERRE TV :
Maurice Gruau naissance d'un vieux prêtre.
Ancien curé d'Appoigny dans l'Yonne, prof de fac, journaliste, ethnologue, prêtre ouvrier, diplômé en linguistique, Maurice Gruau a publié de nombreux livres dont le dernier "Naissance d'un vieux prêtre".
À 82 ans, il a donné une conférence d'une heure et demi, debout, à la salle des fêtes de Coulanges-la-Vineuse.

"La trace des prêtres-ouvriers a profondément changé, dans la classe ouvrière, l'image de l'Église. Le fait que des chrétiens soient sortis de leur enceinte, ça a changé le visage de l'Église pour ces populations pour qui l'Église était pour les riches." Joël Chérief - Prêtre et ouvrier.

"Le travail, moyen prévu pour que l'homme se construise et pour édifier un monde humain et juste, ce travail reste encore un lieu de précarité, d'inégalité, donc un moyen qui n'humanise pas. En se plaçant au cœur de cette contradiction, en la vivant volontairement avec ceux qui la subissent, les prêtres-ouvriers ont rejoint l'endroit où l'homme peut se relever, à condition de partager sa vie. Le relèvement se fait par une parole à hauteur d'homme. Mais la parole avant d'être des mots se fait présence et incarnation." Albert Rouet - Archevêque.

Partager l'Évangile avec le monde ouvrier, "inventer une nouvelle manière de vivre entre les Hommes, c'est une belle idée, mais une idée ambiguë. On confond les bénéfices de l'amélioration matérielle des conditions de vie avec l'apport des sacrements". Éric de Moulins - Évêque.

Et demain ?
Un grand nombre de personnes continuent de quitter la religion catholique. La sécularisation de la société se poursuit, certaines valeurs du domaine du sacré passent dans le domaine du profane. Dans le contexte de Vatican II, l'Église avait cherché à reconquérir les classes populaires en mettant en avant les valeurs évangéliques, la solidarité, le partage, la justice sociale. Mais elle s'est heurtée à l'engagement socio-politique des ouvriers. Et la valse-hésitation des institutions catholiques qui craignaient de déformer le message chrétien en l'adaptant à la classe populaire, a fini par décourager les plus conciliants qui, quand ils ne quittent pas la religion, se retournent vers les évangéliques et les musulmans qui sont eux aussi très présents sur le terrain mais avec un message simple sans théologie, avec une aide concrète, et avec la promesse d'intégrer un réseau de solidarité.

Sacré = Séparé
" En latin, comme en hébreu, SACRÉ veut dire SÉPARÉ. Le monde des dieux interagit avec le notre, mais ce qui le caractérise, c'est d'être en dehors du notre. En faisant entrer les dieux dans nos fictions de divertissement, nous brisons la frontière entre le SACRÉ et le PROFANE. "
Patrick Jean-Baptiste (Interview Télérama pour le Dictionnaire universel des dieux, déesses et démons).

2084 La fin du monde, roman, contre-utopie de Boualem Sansal (né en 1949) publié en 2015.
Lire la quatrième de couverture sur le site de l'éditeur.
Extrait : ... quel rapport existe-t-il entre religion et langue ? La religion se conçoit-elle sans une langue sacrée ? Qui de la religion et de la langue vient en premier ? Qu'est-ce qui fait le croyant : la parole de la religion ou la musique de la langue ? Est-ce la religion qui se crée un langage spécial par besoin de sophistication et de manipulation mentale, ou est-ce la langue qui atteignant un niveau élevé de perfection s'invente un univers idéal et fatalement le sacralise ? Le postulat selon lequel "Qui a une arme finit par l'utiliser" est-il toujours valable ? Autrement dit la religion est-elle intrinsèquement tournée vers la dictature et le meurtre ?

La Samaritaine
Le Christ et la Samaritaine - Angelica Kauffmann
"Crois-moi, femme, l'heure vient où ce n'est ni sur cette montagne [le mont Garizim], ni à Jérusalem que vous adorerez le Père..." Évangile de Jean Chapitre 4 Verset 21. 
"En une seule phrase, Jésus anéantit toute prétention pour une religion à être le lieu de vérité."
"Quelles que soient les religions, l'important est d'être relié à sa conscience pour atteindre la vérité."  Frédéric Lenoir.

  Sources et ressources : 
>>> Article de Wikipédia sur les prêtres de rue.

- Le Père Michel Jaouen 
- Le sacré et l'argent / France Culture - Entendez-vous l'éco ? :
     Épisode 1 : L'économie contre la religion
     Épisode 2 : Dans les comptes du Vatican
     Épisode 3 : Les finances du culte musulman
- Les Maisons Familiales Rurales

Gustave Thibon - Philosophe (1903-2001).
Il se définit comme un anarchiste conservateur. Il est l'un des fondateurs de l'association Économie et humanisme.

Jeanne Poncin - Sœur-ouvrière (née en 1938).
>>> Biographie dans la Lettre-info (page 4) du Groupe Partage.
>>> Émissions de France Culture = Jeanne, sœur-ouvrière : Le choix ouvrier (1/2) et Vivre en quartier populaire (2/2).

Jerzy Popieluszko - Prêtre (1947-1984). " Vaincre le mal par le bien. "
En 1972, il est ordonné prêtre par le cardinal Stefan Wyszyński.
En août 1980, le cardinal Wyszyński lui demande d'être l'aumônier des travailleurs des aciéries de Varsovie. Il devient l'un des défenseurs du syndicat indépendant Solidarnosc créé le même mois lors des Accords de Gdansk.
Il donne des conférences pour enseigner aux travailleurs l'histoire de la Pologne, la littérature, l'économie, le droit, la doctrine sociale de l'Église et l'art de la négociation.
Chaque dimanche, ses sermons, largement diffusés à travers le pays, dénoncent le régime communiste, le mensonge d'État et l'absence de liberté.
En 1984, il est assassiné par des membres des Services de la police politique.

Jacques Lœw - (1908-1999). Dominicain, docker à Marseille (Dés 1941), fondateur d'un institut religieux (1955 - La  Mission Ouvrière Saints Pierre et Paul) et d'une École de la foi(1968 - Fribourg), missionnaire au Brésil(1963-1969), formateur en Afrique et en Russie, conférencier de Carême au Vatican (1970), auteur spirituel à succès, ermite dans des communautés cisterciennes...
" Quand, après 1945, nous allâmes au cœur des masses, nous avons senti le poids des scléroses, des routines. On a alors, pièce par pièce, dépouillé l'armure : cornette, soutane, clôture.… Tout cela, il fallait le faire, même maladroitement. Mais par quel squelette intérieur remplacer la coquille protectrice ? La Parole de Dieu, lue, méditée, soufferte, priée."
Les dockers de Marseille - Analyse type d'un complexe. Préface de Gustave Thibon. Étude écrite en 1943 et publiée en 1944.

Pierre Andreu - Journaliste et auteur (1909-1987).
Grandeurs et erreurs des prêtres-ouvriers (1955).
Histoire des prêtres-ouvriers (1960). " Au révérend père Jacques Lœw, qui, depuis dix-neuf ans, contre l'hostilité des uns et les préjugés des autres, trace, sans se lasser, la voie de l'évangélisation du monde ouvrier, dans l'obéissance humble et la recherche audacieuse, ce livre est très respectueusement dédié."

Simone Weil

Simone Weil (1909-1943) - Philosophe. Elle sera tout à la fois, professeure, ouvrière, anarchiste, révolutionnaire, résistante et mystique.
En 1934 et 1935, Simone Weil, alors professeure agrégée, décide de travailler en usine comme manœuvre sur machine à l’entreprise Alstom puis chez Renault. Elle entendait vivre cette expérience pour avoir un contact direct avec la réalité. Elle en tire une dénonciation de l’aliénation du travail tout en affirmant une spiritualité du travail authentique.
" Simone Weil était une sublime entêtée, elle n'a jamais accepté le moindre écart entre la pensée et l'action " / Maurice Schumann >>> Une émission de France Culture.
" Simone Weil concevait sa vocation comme une vocation qui supposait toujours d’être exposée, elle fait moins des expériences qu’elle n’affronte des épreuves : celle de la guerre d’Espagne, même si c’est très court, l’épreuve du travail en usine, et elle aurait voulu aussi éprouver la condition de combattante en France puisque quand elle était à Londres, elle ne désirait qu’une chose c’était d’être parachutée en France pour être active dans la résistance. On le lui a refusé et en partie, je crois, elle en est morte... Ça contrariait une vocation. Un travail d’intellectuelle de bureau n’était vraiment pas sa nécessité intérieure, comme elle disait." / Robert Chenavier >>> Une intellectuelle à l'usine / Les chemins de la philosophie / France Culture.

La condition ouvrière (1937) : Version électronique + Liens sur Simone Weil / Université du Québec À Chicoutimi.
" Quand je pense que les grands chefs bolcheviks prétendaient créer une classe ouvrière libre et qu’aucun d’eux — Trotski sûrement pas, Lénine je ne crois pas non plus — n’avait sans doute mis le pied dans une usine et par suite n’avait la plus faible idée des conditions réelles qui déterminent la servitude ou la liberté des ouvriers, la politique m’apparaît comme une sinistre rigolade." - Extrait d'une lettre adressée à Albertine Thévenon, son amie syndicaliste.

Simone Weil par ceux qui l'ont connue - Émission préparée par Olivier Germain-Thomas et Pierre-André Boutang, et réalisée par Parviz Kimiavi :


Simone Weil, philosophe sur tous les fronts / France Culture - Les chemins de la philosophie (décembre 2018).
Épisode 1 : Une intellectuelle à l’usine
Épisode 2 : Aimer le Christ : de la douleur à l’extase
Épisode 3 : L’engagement contre la barbarie
Épisode 4 : L’enracinement, premier besoin de l’âme